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25 janvier 2013 5 25 /01 /janvier /2013 23:29
Non, je ne m'en vais pas. Simplement qu'on a écouté un shuffle de 3 disques de Graeme, dont Brassens en angliche ce soir, devant le feu, et qu'on voulait vous partager cette merveille.
Graeme est de 1926, comme mon défunt papa, et c'est mon autre papa. Il a changé ma vie. Que sa tendresse qui affleure de peau vous submerge aussi.
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18 janvier 2013 5 18 /01 /janvier /2013 14:36

 Ce blog doit au moins la moitié de son contenu aux échanges verbaux que nous avons, Mme VJ et moi. Si Maupassant définissait le couple comme "un échange de mauvaises humeurs le jour, et de mauvaises odeurs la nuit" (Mademoiselle Fifi - 1882, phrase souvent attribuée à Sacha Guitry), nous nous situons ailleurs. Nul humain ne peut bien sûr échapper à ces deux fléaux, mais notre ciel commun est bien plus clair que cette affreuse vision.

 

Nous lui préférons, avec quelque réserve, celle bien connue de Saint-Exupéry : "Aimer, ce n'est pas se regarder l'un l'autre, c'est regarder ensemble dans la même direction".

 

Pourquoi opposer l'une des moitié de la phrase à l'autre ? Telle est notre réserve. Hé, St Ex, tu ne la regardais jamais, Consuelo ? Pour le reste, nous sommes d'accord. Avoir défini un but commun, et s'entraider à le rejoindre.

 

Tout nous est prétexte à aller de l'avant. Chaque événement, chaque stimulus, chaque mouvement intérieur, chaque production mécanique de l'un ou l'autre, chaque réticence, chaque enthousiasme suspect, tout, nous passons tout au crible.

 

Ça peut peut-être (nous l'ignorons) paraître fastidieux et tristounet, vu de l'extérieur, mais rien n'est devenu pour nous plus naturel et vivant, rien n'est plus important, plus vital,  l'essence de la vie même, que cette inlassable recherche commune de l'adéquation à notre véritable nature.

 

Je viens de laisser dans un commentaire sur le BBB mon sentiment quant aux FBouc et autres vitrines de l'ego. Sauf dramatique erreur de ma part, ce blog n'a rien de commun (rassure moi, Madeleine) avec ce genre de débauche pornographique.

 

Voyeurs s'abstenir. Je doute que les lecteurs du JVJ soient des voyeurs. Et si c'était le cas, bienvenue à eux.

 

Ce midi, en croquant des crevettes à l'ail, nous avons enfin, croyons-nous,identifié le second mur de la prison.

 

Le premier, à gauche, c'est la peur, et toutes les limitations qu'elle implique. Le sujet est immense, il y a des années que je le traite et que de plus savants que moi en ont étudié tous les impondérables, je n'y reviendrai pas.

 

Anéantir la peur, c'est un voeu pieux. Pour moi. On en arrache une pousse, il en vient d'autres. J'ai écrit quelque part qu'il faut en arracher les racines, je maintiens.

 

Continuons, jusqu'à ce que ce qu'enfin toute peur disparaisse.

 

Mais de l'autre côté de la prison, il existe un autre mur, aussi limitant et tout aussi difficile à réduire : l'orgueil.

 

Qu' Evagre le pontique donnait en dernier, comme le plus pernicieux, qui découle du sentiment d'être victorieux : " Cette pensée-là, tous les démons vaincus la développent [en faisant croire qu’ils ont été facilement vaincus] et par elle tous trouvent à rentrer dans les âmes, les mettant finalement dans un état pire qu'auparavant".

 

L'orgueil, pour Mme VJ et moi, ne se limite pas à cela, et peut trouver sa source bien ailleurs. Tout peut être prétexte à se sentir supérieur, mis à part, distingué.

Et se sentir tel, c'est se retirer de l'amour, qui est le ciment des mondes. Il y a même des orgueils bienveillants, ou des bienveillances orgueilleuses, qui ne sont en fait que de luxueuses prisons. Splendide isolement. 

 

"Maître" (je mets des guillemets, parce que, franchement, ça veut dire quoi, "Maître" ?) Philippe de Lyon disait de lui-même qu'il était tout petit, le plus petit.

 

Plus nous allons, Mme VJ et moi, et plus nous sommes convaincus de ceci : il n'y a d'autre but que de devenir rien. Le plus petit. Si comme je l'écrivais ici (je rappelle qu'en fait JE n'écrit pas. "Je" transcris, ce qui est différent).

 

Même si en toute modestie, c'est l'ego qui s'attribue le mérite d'être devenu tout petit, rien ou quasi rien, c'est une erreur, il faut rejouer la partie depuis le début.

 

Les apparences n'ont rien à voir. On peut vivre nu et couvert de poux sur un tas de fumier, et trimbaler des tonnes d'avoirs. Et prince de nombreux royaumes, libre de toute suffisance.

 

L'autre mur, une fois vaincue la peur, c'est l'orgueil. Le sentiment de sa propre importance, cette tour d'ivoire, tour d'orgueil dans laquelle nous dominons le monde.

 

Quand Iblis a été chassé, quand Lucifer perdit dans sa chute l' émeraude qu'il portait au front, qu’a-t-il perdu ?

 

L’amour, bien sûr. Ou, si l’on préfère, le sentiment d’empathie. Il est devenu l’orgueilleux fuyard retranché dans un burg à flanc de montagne, dominant, loin des passions et des malheurs des hommes, ces hommes de boue qu’il méprise et calcine d’un regard flamboyant. Mais il est privé d’amour. Et sa vie n’est qu’une plaie béante, qu’il refuse de voir et de soigner. La haine est le refus de l’amour et du partage. La haine marche avec l’orgueil, sur les sentiers escarpés de montagne qui s’approchent au plus près du ciel, mais en ignorent tout.

 

La pierre qu’il portait au front, qui faisait déjà son orgueil, lui, le plus beau des anges, qui a refusé de se prosterner devant aussi peu qu’un homme d’argile, cette pierre était convexe.

 

Dans la légende du Graal, elle a été creusée, évidée en coupe. De yang, elle est devenue yin. Concave. 

 

Le sentiment de sa propre importance est devenu le calice qui recueille le suc, l’élixir des souffrances, pour en nourrir le roi pécheur, qui vit reclus au fond de ses douleurs, sur une terre dévastée (gaste).

 

Il y a donc là une inversion. C’est à cette inversion qu’il faut parvenir pour retourner. Les anciens appelaient cela « conversion », ou changement du cœur.

 

Les mots s’usent, d’être rabâchés sans intelligence (l’intelligence du cœur, justement). Et parfois nous jetons le bébé avec l’eau du bain.

 

Jetons l’eau, oui. L’eau sale des formatages et apprentissages de perroquets. Mais gardons l’essentiel, le feu qui couve.

 

Parce que jamais rien n’a changé, sauf le décor. Jamais rien ne change, jamais. Quel que soit l’endroit où nous fuyons, notre fardeau est toujours le même, toujours. Un peu de répit, et il revient, demandant toujours : ouvre-moi, regarde-moi.

 

Si la peur est le mur charnel qui voisine l’animalité, l’orgueil est celui qui nous empêche d’accéder à la spiritualité. C’est un obstacle psychique illusoire qui nous laisse accroire que nous pouvons être auto-suffisants. Un dieu capable de tout.

 

Sans doute faut-il avoir mangé jusqu’au bout ce fruit hallucinatoire et hallucinogène pour déboucher enfin sur cette découverte : Dieu est le Rien absolu. Croire, se croire quelqu’un ou quelque chose est une maladie dont seul le dépouillement total, l’extinction volontaire est la seule et unique issue possible.

 

Y a du boulot.

 

 

 

 

 

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16 décembre 2012 7 16 /12 /décembre /2012 10:59

Tout le monde a lu la traduction du mot grec : Apocalypse, d'apo calupsè, ce qui se trouve sous le voile, dévoilement, révélation.

 

Le mot a pris au fil du temps et du goût de l'homme pour la peur et la domination un sens dramatique et catastrophique (encore un mot qui devrait être dévoilé, révélé, il désigne un événement soudain venu d'en haut, envoyé par les dieux ; c'est également le 5ème terme, le dénouement, des tragédies grecques, souvent brutal).

 

Mais J.R.R. Tolkien a repéré ce qu'il appelle d'un néologisme : eucatastrophe, ou dénouement heureux, bienveillant.

 

De la même manière, l'apocalypse n'est pas nécessairement l'horreur communément admise.

 

Si l'on convient de la fonction révélatrice de l'existence sur la conscience, dit plus simplement : que les événements qui nous affectent nous amènent à une meilleure compréhension de nous-mêmes, qui sommes le nombril de notre monde, et donc du monde projeté depuis ce centre, on doit également convenir que chaque jour est une apocalypse, chaque minute, chaque minuscule événement subitement surgi, subi, contient sa charge nucléaire explosive de conscience.

 

Cette connaissance passe par nous, elle allie l'événement ressenti comme extérieur à l'effet qu'il produit en nous, ce qu'il révèle de nous, nous permet d'apprendre sur nous. C'est pour cela que la connaissance ne s'apprend pas dans les livres, mais bien en vivant : con-naître, cum-nascere, c'est naître avec. La conscience naît de l'événement et de ce qu'il suscite dans notre mécanique.

 

Cela ne vaut bien sûr que pour ceux qui ont soif de lumière.

 

Le drame se joue des aveugles qui se laissent rouler dans la tourmente de leurs passions souveraines, et de leurs maudites habitudes. Tout le monde peut apprendre à nager, trouver une planche et se laisser emporter au rivage, où il apprendra à se tenir debout, et à marcher.

 

Cependant, nombreux sont ceux qui gémissent mais adorent l'obscurité qui les entoure et ce qui s'y trame.

 

Ce matin, nourrissant successivement : le poisson rouge, le chien, l'âne, les poules, je pensais vaguement : comme tous les jours. Puis vint la correction : comme disaient les Anciens : comme chaque jour que Dieu fait.

 

L'important n'est pas ce que désigne le mot dieu, qui n'est qu'une convention. Tous les jours n'existe pas. C'est un reflet trompeur, un reflet inhibant, castrateur, une mauvaise drogue qui fait les zombis du métro, du boulot, du dodo,qu'ils prennent "tous les jours à la même heure".

 

Non.

 

Tous les jours, la même heure, sont des phantasmes, des expressions délirantes d'esprits malades rivés à leurs chaînes, qui les blessent mais les aident à rester soumis.    

 

Pour qui a décidé de s'enfuir, chaque jour, chaque heure, chaque instant est l'opportunité de comprendre un peu plus.

 

Ce matin, poussant ma brouette de foin sous la pluie, ma conscience s'est élargie jusqu'à ce point. Révélation, dévoilement. Apocalypse.

 

Imaginons l'existence terrestre comme une manipulation, une expérience, un jeu virtuel. C'est facile, depuis que les écrivains et le cinéma ont développé ce genre de concept.

 

Imaginons que nous naissons les yeux fermés. Facile, puisque c'est ainsi que nous venons en ce monde.

 

Imaginons que le but du jeu, que nous avons oublié, bien sûr - sinon ce ne serait plus un jeu, un test, une épreuve, une expérience - imaginons que nous jouons contre nous-même, ou, plus précisément, contre la part de nous-même qui a un goût prononcé pour la lourdeur, l'obscurité, l'aveuglement, imaginons que la conscience joue contre l'anéantissement, à chaque instant de ce temps insaisissable qui fuit - tempus fugit - et que le succès dépende de notre faculté, notre capacité à soulever le bandeau, le voile qui a été posé sur nos yeux.

 

Si c'est le cas, je dénonce le scénario actuel de dévoilement des ressorts cachés du monde comme une tentative d'intoxication.

 

Savoir les turpitudes des puissants, voir remonter la boue et les abominables scandales qui jalonnent la course du monde, les horreurs commises à l'encontre des peuples, des enfants, des pauvres, des animaux, de la nature, certes, c'est un progrès, une délivrance.

 

Mais s'il ne s'agit que de s'indigner devant un écran, c'est un savoir stérile.

 

Yves Mounin lisait Avoir : A - voir, ne pas voir. Savoir serait alors : ne pas SE voir. Ne pas voir que tout ce qui ex-iste (à l'ex-térieur)est également en nous. Demeurer séparé, ignorant, aveugle.

 

Pire, sa conséquence logique : jouir de la chute des affreux qu'on exècre est un recul, une autre abomination, une occasion manquée de sortir à la lumière.

 

S'il est possible qu'une révélation sur "des choses cachées depuis la fondation du monde" soit en cours,pour des raisons qui échappent à notre compréhension, cette révélation doit nous bouleverser (renversement de la boule, vue comme planète, ou comme ce que l'argot français (perdre la boule) désigne comme la tête, le mental), nous affecter jusqu'au fond de nos entrailles, arracher, renverser les murailles derrière lesquelles nous rampons nous aussi comme des insectes.

 

Les moyens qu'utilisent les affreux pour mener leurs minables affaires, qui nous répugnent, sont probablement les mêmes que nous employons pour nos discrètes petites combines, et dont nous nous accommodons volontiers.

 

L'esprit de domination règne aussi bien chez les maîtres du monde qu'en moi. Révélation ?

 

Qu'importe que les rois deviennent des saints si je demeure le tyran de ma famille ?

 

Chaque seconde est l'opportunité de soulever un peu plus le bandeau, le voile, afin de nous voir tels que nous sommes.

 

Car c'est la seule véritable connaissance. Non pas : que font les salauds, qui sont-ils ? Mais : qui suis-je ?

 

Le but ? L'ultime moment où tous les voiles tomberont. Fin de partie, aussi bien la fin de tous que la mort individuelle. A ce moment, certains auront le visage entièrement découvert, les yeux ouverts, et seront capables de voir ce qui nous a toujours été caché, pour que l'expérience ait un sens.

 

D'autres auront été à mi-chemin, et pourront peut-être poursuivre.

 

D'autres seront restés prostrés dans l'ombre, sous les pierres, à rêver d'or et de puissance dans leurs nids infects.

 

 

 

 

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30 novembre 2012 5 30 /11 /novembre /2012 22:50

Une émission de télé, de radio, c'est comme une émission de sperme. C'est toujours susceptible de faire des petits. Je vois ces gens branchés du matin au soir, réveillés par la radio, dormant devant la télé, grands ouverts devant tout ce qu'on leur balance, sans capote, sans honte ni retenue, acceptant tout, avalant tout, répétant tout, accouchant chaque jour de ce qui s'est glissé en eux sans qu'ils sachent jamais qui l'a mis là, ni pourquoi, ni ce qu'on a fait d'eux, ni ce qu'ils font, ni ce qu'ils sont, ni pourquoi.

 

 

 

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25 octobre 2012 4 25 /10 /octobre /2012 13:29

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24 octobre 2012 3 24 /10 /octobre /2012 14:41

Notre Mère qui es aux cieux

 

Que ton nom soit sanctifié

 

Que ton règne vienne

 

Sur la terre qui est notre ciel 

 

Donne-nous aujourd’hui notre pain de ce jour

 

Pardonne-nous nos offenses

 

Comme nous pardonnons

 

A ceux qui t’ont offensée

 

En disant que tu n'es pas le Tout 

 

Ne nous soumets pas à la tentation

 

De ne pas les dénoncer

 

Mais donne nous la paix

 

Délivre-nous du mal

 

Et de toutes les mauvaises pensées

 

Afin qu'en Toi nous trouvions enfin le repos éternel

 

 

Amen.

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23 septembre 2012 7 23 /09 /septembre /2012 13:13

Pour moi, malgré ses approximations et ses exagérations, seule la thèse dite "conspirationniste" est capable de rendre compte de la situation du monde dans lequel nos âmes se sont incarnées.

 

Elle seule accumule les données, les faits, au mépris de tous les dangers, qui vont depuis des siècles de l'ostracisme à la mort physique, en passant par tout le registre des souffrances morales, psychiques, affectives, ruine, panique, abandon, désespoir. Sa route est pavée de détresse et de cadavres mais le relai se transmet de bouche à oreille, et puisse-t-il en être ainsi jusqu'à ce que le rideau se lève sur ce cauchemar.

 

Le mépris des "intelligents" n'est qu'une reptation servile. Car la conspiration est un travail incessant de soumission et de corruption. Aussi rutilant et superbe soit-il, un esclave n'est rien que la voix de son maître, attendant sa récompense.

 

Le monde fourmille d'esclaves, prêts à vendre n'importe qui, n'importe quoi.

 

Car ce monde est tombé sous la domination du commerce, et l'on fait commerce de tout. Tout est à vendre, les corps, d'un bloc comme celui des prostitués, ou en morceaux, comme on vend des organes sains pour une poignée de riz ou un snif de poison. A vendre, les âmes,  les voix, les consciences, contre une poignée de cendres.  

 

Mammon, dont le nom rappelle la succion frénétique et aveugle de l'enfant au sein, a marqué ce monde de sa griffe.

 

Tout le monde ou presque le sait, ou devrait le savoir, tant c'est évident.

 

Mais tout ceci est la norme, tant on est devenus sourds et aveugles à l'évidence : tout ici nous est donné, ou plutôt prêté, puisque nous sommes simplement passants.

 

Il s'est installé ici, dans la conscience humaine un parasite parfaitement rôdé, qui étend de plus en plus loin et de plus en plus profond ses sondes, pour se nourrir, et subsister.

 

Le nommer ou chercher à décrire ses stratégies n'est pas mon propos. Je renvoie à la récapitulation la plus aboutie que je connaisse (merci à l'anonyme qui me l'a indiquée).

 

Presque toutes nos pensées, ou ce que nous croyons être nos pensées, nous sont implantées, marquées au fer par un mécanisme si puissant qu'il a pour nous le visage du réel.

 

Par glissements successifs, tout ce que nous croyions nous appartenir nous est enlevé. J'ai lu, parmi cent propositions émises par de prétendus jeunes socialistes, que les propriétaires de leur logement pourraient supporter une taxe nouvelle, du fait qu'ils n'ont pas de loyer ou plus de mensualités à payer.

 

La terre échappe aux paysans, puis aux propriétaires classiques pour appartenir, à coup de taxes, aux états. Les officines se multiplient pour racketter, à l'occasion de cette fameuse prétendue crise, l'or et l'argent. Il faut que tout disparaisse. Que toute richesse matérielle soit enlevée aux hommes. Tout doit appartenir aux banques ou aux états, dont les propriétaires sont les mêmes. Quand la Terre entière sera leur bien, les hommes n'auront alors plus de recours. Pur bétail, qui aura sa pitance en fonction des objectifs princiers.

 

Il y a longtemps que les rouages de la spoliation sont en place. Alors que la planète a de quoi nous rendre tous riches, libres et heureux, elle n'est plus qu'un camp de concentration où rôdent milices et kapos, plus ou moins déguisés sous le miel toxique de l'omniprésente bande-son.

 

La faucille moissonne, le marteau écrase. Le show continue. 

 

Encore un peu de temps, et l'émergence des robots enverra ce qui restera de la race humaine défigurée, dépossédée, désenchantée, au musée des figurants.

 

J'entends d'ici les commentaires désabusés sur ma propension au pessimisme. Je ne crois pas qu'un tel résumé soit pessimiste. Il suffit d'observer le bocal, puis de lever les yeux, pour voir les marionnettistes à l'oeuvre.

 

Ivres de leurs innombrables succès, ivres de meurtres et de jouissance, ivres d'or et de leur propre importance, ils n'ont aucune conscience de ce qu'ils font.

 

Je veux ici citer Henry Makow, juif lui-même, ce qui ne suffit plus à désamorcer la haine bien-pensante des rouages :

 

"Le Christ représentait un Dieu universel et une morale universelle. Son enseignement représentait le prochain stade naturel, que les juifs auraient dû embrasser, tout en conservant leur intégrité raciale.

 

En rejetant l'enseignement du Christ, les Pharisiens ont placé le peuple juif dans l'opposition perpétuelle aux meilleurs intérêts de l'humanité, en travers du chemin ultime et inévitable de l'évolution spirituelle de l'homme.

 

Ils ont placé les juifs dans un état de révolte métaphysique permanente qui, à un niveau personnel conduit à l'aliénation et au dysfonctionnement.

 

Le Christ a enseigné que Dieu est Amour. L'amour est le plan directeur. L'amour est la lumière. Aime ton prochain. Fais aux autres comme tu voudrais qu'ils te fassent. Quelle faute les Pharisiens purent-ils trouver à un évangile qui prêche la fraternité humaine et le fait de mettre les autres avant nous-même ?

 

Il les privait de leur revendication spéciale à être le "peuple élu" de Dieu, et d'administrer la volonté de Dieu, qui est vraiment la leur."

 

Makow, comme de nombreux juifs anti-sionistes, est lucide sur le rôle que tiennent les juifs, ou une partie d'entre eux dans ce processus de négation de l'homme, de liquidation progressive de l'humanité.

 

Comme le troupeau de goyim qui leur prêtent main-forte, ils ne sont que des rouages dévoués à leur propre intérêt immédiat, avidité et ruse sordide qu'ils nomment intelligence, aveugles qu'ils sont à l'autre monde dont celui-ci n'est qu'une ombre crasseuse.

 

Leur travail d'appropriation est celui d'un ver dans un fruit. Quand ils l'auront dévoré, ils mourront de faim et de désespoir, sur les ossements de leurs victimes.

 

C'est cela, la pyramide réelle. Des cadavres de vers sur le cadavre d'un monde.

 

Pessimiste ?

 

Non. Car ce travail de consomption, qui ronge nos corps et nos âmes comme de l'acide est peut-être le moyen de nous détacher de la pesanteur qui nous lie ici. Tant qu'il y a de l'espoir, quelque os à ronger, tant qu'il reste en nous un gramme d'avidité, un soupçon de mensonge, un relent de profit, nous restons volontiers dans ce monde dont ne nous sommes que les hôtes oublieux.

 

Pour certains, ce désir va au delà d'une existence humaine. Après la dissolution de notre corps, le désir nous ramènerait encore et encore, selon le cycle des renaissances. 

 

Et comment échapper à cette roue infernale, si ce n'est poussés, contraints, chassés ?

 

Et comment renaître sur Terre dans l'avenir, si nos avides maîtres du monde trouvent préférable de régner, c'est-à-dire d'exercer leurs passions dévorantes sur des cours de robots serviles, dans un enfer éternel ?

 

Une fois cette porte fermée, et soyez sûr qu'elle se ferme, à moins qu'elles ne choisissent la voie du bétail, et donc de la mort véritable, les âmes gravitant dans l'orbite terrestre devront enfin prendre la voie du Retour, ou de la Vie, par delà la mort apparente, qui est renonciation. 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

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14 septembre 2012 5 14 /09 /septembre /2012 22:48

Dans un antique château princier des Bois Noirs, au dessus de Vichy, le XIXème siècle matérialiste, moderne, utilitaire, mécanique et hygiéniste installa un système aussi rudimentaire que novateur qui permit d’acheminer dans une citerne de plomb, sur les toits et au-dessus du dernier étage de l’eau chaude dans un réservoir qui desservait les salles de bains, splendides installations qui ébaubirent les hôtes peu coutumiers de ce genre d’ablutions, et qui d'ailleurs ne s’en lavèrent pas forcément plus.

 

On chauffait l’eau dans les caves, à grands brasiers, et c’étaient deux ou trois ânes qui donnaient l’élan moteur, attachés à une roue. Du jour où ils y pénétrèrent, jamais ces ânes ne virent plus le jour. On les détachait pour qu’ils boivent, se sustentent et dorment, toujours dans l’obscurité  avant de reprendre le harnais, et jamais ils ne sortirent vivants des caves.

 

Pour les adeptes d’Orphée, l’existence humaine n’est rien d’autre que la vie de ces ânes.

 

Au mépris des annonceurs de merveilles toujours repoussées qui fleurissent à satiété, résumons les voies qui de tous temps s’offrent à nous, humains, qui sommes dès l’arrivée, dès le seuil du sexe maternel relâché, vaincu et béant, dûment estampillés, torchonnés, vaccinés, bientôt pucés, tels du bétail, avant d’être paternellement déclarés, reconnus, prénommés, immatriculés, ainsi enregistrés sous toutes les coutures par notre propriétaire, légitime ou non, le prétendu mais efficace prince de ce monde. Lequel semble n’avoir que peu de soin de nous, pauvres d’entre les pauvres. Notre avenir terrestre semble se resserrer de jour en jour.

 

A moins que j’en oublie – mais ma science est mince – telles sont les voies :

 

-       Sous la pluie de coups de fouet, prendre le harnais, et tirer. Ne jamais sortir des caves. Y crever d’usure et désespoir, laissant l'obscure charge au pauvre fruit de nos entrailles.

-       Se révolter, ruer, et mordre. Essayez, et vous verrez que tout est connu depuis longtemps des techniques de soumission. Les crocs des chiens sont aiguisés.

-       Se laisser mourir. Les esclavagistes arabes savaient que certaines peuplades noires préféraient se laisser mourir que de vivre contraintes (les Peuls, peut-être, mais ma mémoire est imprécise), et ne les razziaient plus. Toutes les addictions sont une forme plus ou moins rapide de suicide.

-       Imaginer une solution pour prendre le contrôle du système, et devenir un tortionnaire à son tour. Beaucoup d’émulation, beaucoup d’appelés.

-       Partir dans le désert, ce qui s’apparente plus ou moins à la troisième voie, sous un aspect de dignité et de hauteur plus ou moins authentique.

-       Prendre le harnais, en se disant que c’est le seul choix qui permette de franchir cette putain de crevasse, sans jamais perdre sa liberté d’être, d’observer, de penser, et d’arriver ainsi intact et plus sage au bout de la course. La seule voie qui laisse la faculté de perdre son temps – sa vie – pour s’attarder auprès d’un plus pauvre tombé sur le bas côté, car, tous comptes faits, cette course n’est pas la nôtre, ni ses objectifs.

 

Chacun de nous, je crois, essaie un peu de chacune de ces voies, pas nécessairement exclusives.

 

Tous égaux devant l’épreuve, nous devrions être tous égaux devant la ligne de partage.

 

A moins que la pureté de l’intention, la compassion et l’abandon de la volonté propre, ou de sa propre importance n’aient un rôle à jouer.

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25 juillet 2012 3 25 /07 /juillet /2012 08:55

Fichier:Diverse torture instruments.jpg

 

 

Vierge de Nuremberg et autres delicatessen

 

 

 

J'ai horreur des villes.

 

Ce n'est pas nouveau. J'ai toujours eu une profonde répulsion pour les alignements de cages prétentieuses et boursouflées, ou criant la misère, selon les quartiers, et les défilés d'humains cloisonnés dans leur image volontairement neutre, désirable, agressive, toutes déguisées.

 

Traversant cependant par force le centre de cette cité titanesque et caoutchouteuse : Clermont-Ferrand, j'ai découvert (pas tout à fait, ce n'est qu'une confirmation de ce que j'avais pressenti ailleurs) que la ville moderne est profondément anti-naturelle, et anti-humaine : tous les arbres auxquels l'esprit urbain a délivré le permis d'exister en ligne droite dans le béton et les dalles de gravier enrobé ne portent que des fruits impropres à la consommation des hommes.

 

Ils ne sont qu'une sorte de rappel fétichiste d'une nature raclée de ses attributs nourriciers et protecteurs.

 

Nulle part, de pruniers, de pêchers, de pommiers ou de poiriers, de noyers dont pourraient se nourrir les démunis. Pas plus de cassissiers, framboisiers, groseilliers, noisetiers qui feraient la joie des enfants. Si l'univers minéral consent à héberger de la verdure, celle-ci doit absolument demeurer stérile et sans attraits.

 

La république est une vierge austère et dénuée du moindre charme. C'est un mannequin à la mode des seventies, squelette obscène privé de chair et des attributs de la féminité.

 

Seth, le dieu du désert est ici chez lui. Rien n'est fait pour l'homme, rien n'est donné. Tout se paie. 

 

Cette sinistre mise en scène a sans doute pour prétexte le souci de protection des populations : glisser sur un fruit tombé, c'est dangereux. Sans parler du dard venimeux des guêpes et du caca des écureuils et des oiseaux.

 

Crever de faim est un moindre souci, puisqu'il est totalement nié et occulté. Le pauvre, parce qu'il est moche, malade et sans boulot doit crever rapidement et sans raffût. Il existe d'ailleurs un tas de corps de police à cet effet, à commencer par Paul en ploie (sous la tâche), dont le rôle est de radier à tour de bras le maximum de bouches inutiles. 

 

La nature jadis féconde et bienveillante n'est plus maintenant perçue que comme menaçante et malveillante. 

 

Voici venu le temps du onzième commandement : "Tu n'attendras ton salut que de la société des hommes". Et, si elle n'a pas le temps, la volonté ni les moyens de le faire : crève, connard. 

 

L'homme moderne - sorte de contrefaçon de l'Homme, et certainement pas Fils de l'Homme - est enfin presque mûr pour se réfugier dans les bras maigres des vierges technologiques qui ne rêvent que d'épousailles mortifères.

 

Hitler et Staline, Pol Pot et Mao, ces grands précurseurs 

- le dieu de l'efficacité et de l'hygiène totale les aie en sa sainte garde - ont montré la voie.

 

Suivons-les ! 

 

 

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29 juin 2012 5 29 /06 /juin /2012 08:32

Je vais m'absenter pour quelque temps. J'ai absolument envie et besoin de le faire, c'est-à-dire, de disparaître. Disparaître à vos yeux, c'est facile. J'aimerais aussi pouvoir disparaître à mes propres yeux, ça me ferait des vacances. C'est à ça que je pense. J'embrasse celles et ceux qui pour des raisons qui leur sont propres ont passé du temps à se chercher dans mes mots. 

 

Voici un texte qui date de près de 18 ans, qui m'énerve un peu, peut-être un peu pompeux, un peu trop trituré, précieux, littéraire, ampoulé, tant je l'ai élagué et raboté, qui relate de façon symbolique en reprenant des matériaux du mythe d'Ulysse, Odysseus, mythe du retour à l'Unité, une crise profonde vécue à cette époque, sur plusieurs mois, voire plus d'un an, qui elle même condensait les souvenirs d'une et peut-être de plusieurs vies.

 

Y sont exposés de multiples visages de la femme éternelle, des guerres, des guerres, des épreuves et des naufrages, des pertes, des défaites. Et, j'espère, entrevue, l'Étoile. 

 

La relation elle-même, relation des enfers traversés, des traces de lumière ça et là, des tempêtes émotionnelles et de leurs achèvements a duré quatre jours, quatre jours d'accouchement difficile, et en a été plus ou moins le terme.

 

J'y vais, les valises sont prêtes.

 

 

Ivan Aïvazovski 

 

 

Je l'ai cherchée partout, depuis l'instant où l'air a sifflé par le canal de mes narines.

 

J'ai beau fermer les yeux, fouiller l'arrière de mon crâne, poser une lampe torche dans la nuit de ma nuque, jamais je ne vois son visage.

 

Absente, est-elle, et je l'appelle: l'absente.

 

Jamais fissure ne fut plus fuyante, jamais présence ne fut plus pesante, ni oppressive que la trace diffuse de son odeur passée, son cri muet, sourdant des fontaines occluses, des murs veloutés et doux, des volets rêches et des marches opiniâtres.

 

Certains poèmes me revenaient par bribes, des filaments de danse aux hanches tordues et disjointes.

 

Je ne sais d'où me vint le goût des promenades par la ville, peut-être me lassai-je de la forteresse des livres, de l'enchevêtrement des mots crevés, raidis par l'amidon du bon usage.

 

L'ai-je cherchée dans le lourd brocard des romans français, dans l'écharpe sanglante des russes, ou l'ai-je débuchée pour la perdre encore dans la forêt, sous le rire moqueur de Mercure?

 

L'ai-je plutôt rêvée, et ne naissais-je pas d'un rêve, lorsque sur cette place dévorée de soleil, l'air gonfla ma poitrine, et me mit au monde?

 

J'ai voulu tant de ces corps noirs et lourds, aux fentes grasses et molles, oeil, lippe, mamelle gluants comme poix, comme la toile cirée de l'araignée, et j'ai bu tant de ce vin lourd et âpre, aux remontées de feu vulgaire, puis vomi tant de ces jours-là, passés à me blesser, à me percer encore de toutes les douleurs, à m'enrouler dans le rubis cocon de ma tiédeur, à me bercer de souvenirs et de phantasmes, où un royaume à peine éclos de jeunes filles et de joyaux, où le ciel s'ouvrirait pour moi, et ces corps noirs et la douleur, à me parer, pour oublier le cri des bêtes dans les rues, le cri des ventres, le cri de ceux qui n'ont plus rien, ne sont plus là, le ventre mou de ceux et celles qui n'ont ni yeux ni bouches, ni rien, que le nickel et le chrome de leur fard, la coquille grise et tournée de ceux qui traînent leur fardeau partout, sans le voir.

 

J'avais bu tant et goûté sans les voir de ces chairs noires et volubiles, que soudain mon estomac se révulsa, et que dans un grand hurlement de folie, je déchirai mon ventre de mes ongles, je lacérai ce que les années filées m'avaient laissé de vêtement, puis m'enfonçai loin dans l'orage.

 

J'entrai profond dans le boyau du monde, dans les méandres et la noirceur je fus longtemps, dans les tempêtes, sous le regard indifférent des dieux de pierre, sous le regard des étoiles, et je nageai tant dans la houle, qu'une main me tira des aspérités de la roche et me jeta sur une plage.

 

Je me souviens de l'équipage déjà aveugle, auquel je commandai de me lier, et dont je bouchai les oreilles afin qu'il ne se révolte pas, alors qu'elles gémissaient tant de promesses, cheveux, parfums, jardins, cythares, tant de roulis, tant de secrets, quand je n'avais rien à donner, tant de dangers et d'éraflures, tant de labeur et de fatigues...

 

De leurs mains grises je fus lié après le mât, des chevilles à la gorge, et je pus tout entendre de leur boue, des pierreries de leur cadavre; je sus que le vent qui emplit leur chant est celui des fonds, et que dessous leur masque gît le serpent, bleu de la nuit, qui se coulisse dans les trésors et les vases d'or, mais les vases sont vides et renversés, et la lumière a fui de ces opales, de ces charbons, de ces diadèmes, et tout cela n'est que leurre et poussière du temps; quand cependant je me tordais dans les liens, cherchant la corde de mes dents, bavant de rage, puis les vagues nous emportèrent et nous passâmes.

 

 

File:6233 - MI - Cappella Portinari - Arca S. Pietro - Temperantia - Foto Giovanni Dall'Orto 1-Mar-2007.jpg 

 

Cappella Portinari, Milano  

 

 

Sur la place elles descendent, et bavardent près de la fontaine.

 

L'eau du dessous jaillit d'en-haut et ruisselle des gueules ouvertes de grands lions calmes, et de dauphins tenus au col par d'enlaçantes jeunes femmes dans trois vasques successives.

 

Puis l'eau fuit par les grilles luisantes et retourne à la terre, chargée de lumière.

 

Elles sont-là, et certaines n'ont rien à faire.

 

Elles ont des mains d'oiseaux et les pieds nus mais je n'en reconnais jamais aucune, tant elles sont soeurs, et leur visage est sans dessin, ou trop précis peut-être, tel un fruit de printemps tendu un jour puis effacé, sans que l'on sache où en est passée la chair. Elles n'ont que des rires ténus et de longs bavardages souriants, puis lorsque le soleil vient au zénith, elles s'envolent et remontent par les ruelles dans les maisons ombreuses où elles disparaissent.

 

D'autres plongent dans l'or froid et limpide leur jarre de terre cuite, et l'en retirent d'un mouvement de hanche, et celles-là sont des déesses à chaque fois, leur robe blanche en fin drapé, et le regard portant au loin, comme une flèche indifférente, et ce sont des femmes de proie, et les maris et les enfants aux poings liés, agenouillés, et le marbre de leurs genoux, jamais de sang, jamais d'aisselles, pas le baiser goulu, pas le remugle des sphincters, pas les ventouses, ni de diarrhée sur la faïence.

 

Elles étincellent, et puis remontent les ruelles vers les temples secrets où elles demeurent.

 

L'une a un panier d'algues, et son odeur marine me tire à elle, les scintillements du collier de ses dents m'appellent et chantent à mes tympans, comme m'appela le récit des vieux hommes dans les ports qui parlaient du pays d'en-bas, dessous la mer, dans la conque où il dort, l'ancien serpent, serrant dessous son ventre des gemmes et des crânes vides, les dépouilles des héros insouciants et rieurs qui lui firent la guerre, pour y laisser leur jeunesse et leur peau fraîche et vive, pleine de rires et de muscles, mais pas encore faite, non usée par la pierre ponce des peines et des pertes.

 

Que ceux qui n'ont jamais perdu, jamais rien échappé de leurs mains blanches et tendres, que ceux qui n'ont connu que l'amour des femmes et le lait de leur sourire reculent, car leur peau lui sera litière et leur tripe assaisonnée lui fera ragoût, et la perle de leurs yeux d'enfants, avant de s'éteindre, sera le flambeau de ses fêtes.

 

 

turner bateau dans la tempete

 

Turner, 1840

  

 

Le récit des marins me roulait d'un mur à l'autre, et je sus, parce que je suis fort et vide comme qui n'a rien gardé, mais vu rouler femmes et fils, armées, chevaux, palais et coffres, et basculer dans les abîmes les beaux navires, les souvenirs, les pleines malles d'espoirs tremblants, menteurs fantômes comme les craintes, leurs soeurs, éternelles criailleries sans vie, vapeur secouée de vent.

   

Et moi, parce que je suis fort et laid comme le roc, car mes pieds enfoncés par delà le sable où se noyèrent mes hommes et leurs chevaux, reposent au noyau, moi je voulus descendre et lui prendre ce bien qui, pensais-je, était mien.

 

Serpent, mon frère, frère de mon père et de ma mère, serpent ma soeur, ombre et enfant, serpent de nuit, dieu de la peur, de l'autre pôle, dieu second, feu froid et fièvre, sombre torpeur et cliché pâle, frisson, dédale, enroulement, j'ai dévalé tous les degrés où je fus roi, et prince, moi le premier d'entre les miens.

 

Une fois les armes posées, et les manteaux, et les harnais et les ceintures, je pus aller par les boyaux jaunes et rouges de glaise molle; je pus aller vers le dedans.

 

Et je vis passer tous les vieux films d'autrefois, les chers danseurs et les acteurs, qui ne sont plus que fumerolles, et tous les gestes disparus, et la ligue des bonnes raisons, en robes longues, le bateleur, piètre farceur et charlatan, et le couard, et puis le fauve, le professeur, et le prophète qui se gonflait devant le vide, et l'assoiffé qui aurait bu sa propre urine, le vieux docteur humain et bon, l'enfant autiste aux yeux de mousse, et le soldat et le bravache, la pauvre femme serrant les dents, la vieille horreur fermant sa porte et la pute se rajustant, je vis les ombres du passé qui cherchaient à me déchirer.

 

Elle avait dans son panier d'algues des bracelets de coquillages, qui semblaient plâtre sous le diamant de ses yeux et le collier de ses dents.

 

La place sentait la poussière et l'huile grillée trop de fois, le vent méditait des massacres et roulait ces rêves au loin.

 

Je m'arrêtai un jour, tendu, devant une maison carrée.

Derrière les volets tirés, elle chantait un air ancien, que je ne sus pas reconnaître. Je restai debout sans rien dire; puis à la nuit, je repartis.

Qu'étaient les noms gravés là-haut, sur le linteau de la fenêtre?

 

Les gens fuyaient par les venelles, le dos rondi comme des boules, ils se croisaient comme au flipper, et leurs rebonds d'un jour à l'autre les entraînaient jusqu'à la mer. Là, le sel les rongeait, jusqu'à l'os blanchi et l'oubli.

 

Ils étaient ronds comme des boules, et s'évitaient avec ardeur, et jamais l'aube ni aucune lumière ne put entrer dans la grotte de leur milieu, dans le cirque où coule l'eau claire, et où vit sans qu'ils le sachent l'immense peuple des fantômes, la reine noire, la reine blanche, la reine aux visages gigognes.

 

Mais ceux-là sont mes frères, hommes comme moi, atomes de poussière voletant dans le rai de lumière qui filtre des persiennes, sans savoir que dans le ventre de leur ventre, gît le précieux dépôt, et le diamant ici laissé, et nulle lumière n'en vient, nulle lumière n'y entre, tant ils sont clos et durs comme l'acier.

 

La lumière luisait sur eux, sur leur chute vertigineuse, puis ils entraient comme des pierres dans l'eau salée qui tout avale, où sombrèrent mes beaux bateaux, et leurs marins à l'air altier.

 

Moi, comme Icare, j'avais pensé voler si haut, et me garder des vases enfouies en mon linceul, que je tombai d'un coup, en me heurtant, et disparus à tout regard.

 

Un jour, sur le rivage, quand mes hommes festoyaient, je restais à l'écart, une ombre sortit de la terre, et son visage demeurait trouble et gris.

Elle dit: "Regarde-moi", et sifflèrent ses cheveux de Gorgone, et je ployai les genoux.

 

 

Eau-forte - Francisco Goya - Andarse Po Las Ramas; Disparate Ridiculo, (plate 3 from Los Proverbios)

 

Francisco Goya

 

 

Alors, ils vinrent tous, ceux dont j'ai rompu l'échine, ceux que j'ai tenu en ma main, et les visages haïs, et je ne baissai pas les yeux, les contemplant l'un après l'autre, tel qui s'enfuit avec mon or, tel qui fit crouler mon empire, tel qui me vola des promesses, et je dus enfin leur remettre les embûches qu'ils me tendirent, et les fosses que sous mes pas tant de fois ils creusèrent.

 

Il vint aussi, celui dont j'écrasai la tête contre la pierre et le crépi des murs, dont je brisai les os tant de fois, et il vint vêtu comme un roi.

Puis à la fin vinrent les vieux.

Et je dus aussi leur remettre ce qu'ils furent, pour pouvoir enfin me dresser.

 

D'elle, je rompis le cercle qu'elle me mit dans les débuts, lorsqu'elle affermit son pouvoir et me harnacha de ses craintes.

Je lui remis cela, et les craintes s'envolèrent.

Elle me laissa passer.

 

A lui, je remis le rêve qu'il eut de se maintenir en moi, de vivre à l'infini par ma bouche, mes yeux, mon pal et mes mains.

Alors il s'endormit.

 

Puis ce fut moi, et je vis que j'étais ceux-là, et que tombaient mes écailles; je pus me regarder enfin.

 

Alors je m'éveillai. Un grand serpent de pierreries jonchait le ciel en grand habit.

   

Depuis ce temps je l'ai cherchée, quand l'air siffla dans mes narines; depuis ce temps, je suis lavé.

Je sentis l'odeur de la mer, elle resta dans le soleil.

Coquillages et paniers de linge, des filles s'enfuirent en bruit.

Seule elle resta devant moi, & j'étais laid comme le roc.

 

Je la suivis par les ruelles, je la suivis lorsqu'elle montait.

 

Une fois ou deux, elle m'attendit.

 

Maintenant, j'erre par les rues, montant encore vers le sommet. Les maisons ploient sous le silence, volets fermés et portes closes.

Les rues sont chacune un pays, un royaume, le temps d'une vie.

Chacune d'elle est la plus belle, coupée en deux par le soleil.

J'avance un pied dans la lumière, et puis l'autre dans l'ombre douce.

   

Ainsi vais-je par les ruelles, dans la cascade de l'absence.

Ainsi vais-je vers elle, absente, dans la cascade des ruelles.

Ainsi vais-je vers la vie belle, autour du centre du Soleil.

 

 

Pleine Lune,

Sainte Barbara, 4 décembre 1995

Immaculée Conception, 8 décembre 1995.

 

 

 

 

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Présentation

  • : Le jardin de Vieux Jade
  • : Arrivages du jour, légumes secs, mauvaises herbes, quelques trucs qui arrachent la gueule. Taupes, censeurs et culs bénits s'abstenir. Si vous cherchez des certitudes, c'est pas l'endroit.
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Décidément rétif à l'ordre bestial, j'ai fixé ma résidence ailleurs, d'où j'observe le déroulement des temps infernaux, fumier des plus belles fleurs.  J'ai un jardin secret, où les plantes poussent toutes seules. Servez-vous, si le coeur vous en dit, sans tenir compte de la chronologie, car comme le mot le dit clairement, l'heure est un leurre.

 

Une précision concernant les commentaires : n'ayant pas toujours le temps ni l'énergie de répondre aux commentaires, ceux-ci restent ouverts, sans aucune garantie que j'y réponde. Je me réserve cependant le droit de sabrer les inconvenances, dont je reste seul juge.

 

Ici, je n'est pas un autre.

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Qui m’a fouetté les yeux,

M’a déchiré le ventre

Me baisant les paupières

Et m’enduisant de baume,

Me prenant par la main,

Pour me conduire

Dehors ?

Les dits de Lao Yu

LE BUT DE LA QUÊTE EST DE N'AVOIR

NI BUT, NI QUÊTE

 

***

 

QUE SAIT-IL DE LA PESANTEUR,

CELUI QUI N'EST JAMAIS TOMBÉ ?

 

***

 

C'EST SOUVENT LORSQU'ELLE S'ENFUIT QU'ON PERÇOIT L'ESSENCE DE LA BEAUTÉ

 

***

 

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***

 

CE QUI EST MORT N'A AUCUN POUVOIR SUR CE QUI EST VIVANT

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***

 

QUAND LE NID BRÛLE, LES OISEAUX S’ENVOLENT

 

***

 

C’EST DANS LA CHUTE QUE LES AILES POUSSENT

 

***

 

CE QUI PEUT ÊTRE PERDU EST SANS VALEUR

 

***

 

LA MAISON EST PLUS GRANDE QUE LA PORTE

 

***

 

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***

 

LA ROUTE EST DURE A CELUI QUI BOÎTE

 

***

 

LA LUMIERE DE L’ETOILE EST DANS L’ŒIL QUI LA REGARDE

 

***

 

LES PETITS NOURRISSENT LES GRANDS

 

***

 

LES RICHES ONT UNE BOUCHE
MAIS PAS DE MAINS POUR LA REMPLIR

C’EST POURQUOI IL LEUR FAUT
DE NOMBREUX SERVITEURS ;


CEUX QUI ONT DE NOMBREUX SERVITEURS
NE SAURAIENT VIVRE SEULS,

CE SONT DONC DES PAUVRES ;


CELUI QUI PEUT VIVRE SANS SERVITEURS 
EST DONC LE VERITABLE RICHE.

 

***

 

VIVRE C’EST REVENIR SUR SES PAS

 

***

 

LA NUIT LAVE LE LINGE DU SOLEIL

 

***

 

LES RUISSEAUX EMPORTENT LES MONTAGNES

 

***

 

UNE EPINE DANS LE PIED DU GENERAL : L’ARMEE S’ARRÊTE


***
 


UN PORC EN HABITS DE SOIE RESTE UN PORC,
COMME UN DIAMANT DANS LE FUMIER

RESTE UN DIAMANT.

MAIS LA PLACE D’ UN DIAMANT

EST DANS UN ECRIN DE SOIE,

ET CELLE D’UN PORC DANS LE FUMIER.

 

***

 

COMME SEULE L’EAU ETANCHE LA SOIF,
SEULE LA JUSTICE COMBLE LA FAIM DE JUSTICE

 

***

 

DU COLIBRI A L’AIGLE, IL EXISTE DE NOMBREUX OISEAUX

 

***

 

LE DEDANS REGLE LE DEHORS

 

***

 

L’EPONGE BOIT LE VIN RENVERSÉ
ET LA ROSÉE DU MATIN

 

 

***  

 

LORSQU'IL DECOUVRE LE MIEL,

L'OURS OUBLIE LA PIQÛRE DES ABEILLES

 

 

 

 

 

 

 

 

Lisez-Moi Lisez Moi Lisez Moi

Des mots des mots des mots des

Quand à un livre je me livre , ce que je lis me délie.

 

 

Je me demande pourquoi on n'a pas encore une loi qui oblige à faire bouillir les bébés à la naissance, afin qu'ils soient parfaitement stérilisés.

 

Circuler, pour mieux s'ôter.

Toute notre vie, on attend une grande cause pour se lever, et on passe sa vie accroupi, à croupir.

Le lucane aime prendre l'R le soir à sa lucarne.

Ce qu’il y a de bien dans l’état de siège, c’est qu’on prend le temps de s’asseoir.

 

 

Les oiseaux sont les poissons du ciel,

nous en sommes les crabes


Heureux les déjantés, ils quitteront plus facilement la route commune!

 
L’argent n’a pas d’odeur, mais il y contribue.


Un vrai sosie, c’est invraisemblable.

   

Quand je grossis, je m’aigris ; et quand je m’aigris, je grossis.

   

Le temps, c’est de l’urgent.

   

Joindre l’utile au désagréable : se faire renverser par une ambulance.  

 

Le journal du paradis, c’est le Daily Cieux.

   

Yfaut et Yaka sont dans un bateau ; Yfaut tombe à l’eau, Yaka l’repêcher.

 

Chaque matin, s’ils ne sont pas morts, les vieux vont aux nouvelles.

 

Le poète a latitude d’explorer toutes les longitudes.

   

Etre réduit à la portion congrue, c’est fort peu. Moins, c’est incongru.

 

Peut-on dire de quelqu’un
dont la vie dépend des autres pour tout qu’il
est riche ?
La bouche est elle riche ?

Peut-on dire de quelqu’un
qui n’a rien à attendre des autres qu’il est pauvre ?
Les mains sont elles pauvres ?

 

Curieux comme mystique s’oppose à mastoc.

 

On a mis bien des ouvrages majeurs à l’index.

 

Quand le brouillard tombe, on voudrait qu’il se casse.

 

Au matin, la nuit tombe de sommeil.