La voiture montait sur cette route en lacets. Nous longions à droite des rochers escarpés, puis soudain nous fûmes aux pieds d’énormes murs de briques rouge orangé, qui se prolongeaient indéfiniment.
Qu’est-ce que c’est, songeai-je ?
C’est une colonie de vacances, répondit mon passager.
C’était sévère, mais beau. Un air louis-quatorzien, indubitablement. Grand siècle, disent les écrivains. Des proportions majestueuses, écrasantes. Des toits de petites tuiles et des fenêtres mansardées donnaient aux édifices un air raffiné.
Puis je vis que tout cela croulait. Tout était vieux et délabré. M’approchant, je vis des silhouettes apparaître sur la frange des toits.
Des gens qui se tenaient debout, ça et là. D’autres qui sortaient par les hautes fenêtres et débouchaient des greniers.
Je parvins à mon tour par un escalier à un palier, lequel donnait sur un comble poussiéreux, où nul n’était venu depuis un temps immémorial.
Ecrasant du pied une fine couche de gravats blancs de mortier désagrégé, je sortis moi aussi à l’air libre.
Des enfants marchaient précautionneusement mais avec agilité sur l’arête des faitières, comme des chats.
J’y allai aussi. Tout menaçait ruine, mais l’ensemble tenait bon. Je progressai vers les autres. Que font-ils ?
De nombreuses personnes étaient maintenant là, debout, la main en visière. Le vent léger caressait les visages et faisait danser les vêtements.
Je me redressai, et regardai ce qu’ils regardaient. La lumière aveuglante du matin m’obligea à faire comme eux. Je protégeai mes yeux de ma main droite, et mon regard découvrit l’horizon immense.
Nous contemplions la mer.
Tous se tenaient là, debout, silencieux, et contemplaient la mer immense.
Tel fût le rêve qui me fut donné, voici deux nuits.