Il pleut. Mauvais temps, dit la météo officielle.
Beau temps dit l'escargot, qui n'est pas que beau (je sais, elle n'est pas nouvelle) mais montre ainsi qu'il est beaucoup plus intelligent que notre société de carton.
Le "sauvage", homo sylvaticus, qui vit encore puissamment en nous, a envie de sortir et goûter la pluie. Pieds nus.
Je sais, si vous habitez dans une tour d'HLM ou dans ce que certains de mes voisins appellent un "HLM horizontal" : un lotissement, ou dans les "beaux quartiers", ça demande de prendre sur soi. Un vrai combat vis à vis du regard d'autrui.
Arrivant à Moissac, sur le chemin de St Jacques, je n'avais plus un poil de sec. Trempé de chez trempé, pour reprendre une expression moderne très juteuse. J'ai posé et exposé le buvard gluant qui constituait mon bagage au camping municipal, puis je suis parti pieds nus en ville, sous une pluie torrentielle. Les bords de trottoirs étaient des ruisseaux torrentueux, tièdes. Quelle extase, marcher dans un ruisseau d'orage, pieds nus.
Jusqu'au moment où j'ai rencontré un bout de verre qui m'a ouvert sur un ou deux centimètres et fait la salutaire saignée chère au docteur Diafoirus.
Sur cette avanie, je suis rentré dare dare au camping me faire un pansement maison : papier Q, salive. Papier Q, urine, ça marche aussi. Papier Q, ou toile d'araignée et cendres de bois, très bon aussi. Urine, salive, et terre, chiffon, quand il n'y a rien d'autre.
J'espère que l'on ne va pas me poursuivre pour exercice illégal de la médecine. Mais mon chien Smarties, qui avait fait une très mauvaise réaction aux vaccins (vers 1990, déjà!), plaie purulente, grande comme une soucoupe, après éclatement, je lui ai collé une toile d'araignée grand format pour retenir les sanies sanglantes, largement saupoudrée de cendre de bois, un gros bandage pour qu'il n'y touche pas, et hop, quinze jours, plus rien, alors que les prescriptions vétérinaires (permaganate, antibiotiques, le tout au prix du Roquefort) avaient échoué.
Recentrage pour ceux qui ont déjà oublié le début :
Où veux-je en venir, se demanderait le quidam moyen ? Vous lecteurs endurcis des vicissitudes veillesjadesques ne serez pas surpris, et Yog encore moins : à la pluie, qui est l'une des formes du beau temps. Ce que d'ailleurs annonçait le titre (pour ceux qui suivent).
La pluie est une bénédiction du Ciel, et même sans majuscule : du ciel. Les medias n'encensent que le BEAU temps, et nous formatent ainsi à croire que seul un ciel bleu sans nuages (les chemtrails sont admis, cependant) est beau. Le reste n'est pas beau. La pluie, c'est moche, c'est nul. Le brouillard, un temps de chien. La tempête, une catastrophe. Bref, de la merde. C'est comme les zumains: si t'es pas top, t'es moche , ringard. Sous-homme. Vous voyez comme TOUT, absolument tout est falsifié ? Comme on doit détacher l'un après l'autre tous les minuscules et bientôt nanoprogrammes qui alimentent et à la fois pompent notre existence ?
Il faudra devenir nonovigilants, c'est tout. Ne pas paniquer. (ce qui , lu correctement, ne pas pas, deux négations égalant une affirmation, équivaut à : niquer). Ne pas paniquer, c'est niquer. Est-ce clair ? Dépasser sans peur l'obstacle, c'est niquer l'obstacle. Dans l'élégance et l'amour.
Ecoutons un instant la pub:
La nature est nulle, dit la pub officielle, c'est vraiment un truc merdique de nazes rien que bon à nous emmerder, nous les zumains qui voulons profiter un max de nos ouikindes. Ouf que la science vat enfin te foutre ça en l'air, cte putain de nature de merde qui fait chier.
- Mais ça va pas ? Et le votécolo, merde ?
- Oups, esscusez moi, MMMssieu l' DDDirecteur, (avec 3 majuscules), j'ai pas fait essprès, la fourche m'a langué, pitié, pitié, ne me virez pas, j'ai 3 enfants et douze emprunts. Je dénoncerai qui vous voudrez Mais pas moi, pitié !
Après cette séquence hypernéopopuloréaliste, (j'aurais dû écrire dans Poubellelavie, moi, je serais un peu plus rupin, j'pourrais me balader en short panthère et sandales en cobra sous la pluie), je finis après maintes circonvolutions (mais c'est ainsi que coule l'eau, dans la vraie nature) par ce qui constituait ma cible lorsque j'ai bandé mon arc :
Retour au su jet :
La pluie est un remède, un don du ciel. Oubliez vos mises en plis, vos pauvres ou précieux vêtements, sortez en survêtement si vous voulez, short et ticheurtes, à poil si vous pouvez, mettez des nupieds pour éviter la saignée fatale, en laissant d'abord s'écouler toute la merde sur nous projetée.
Laissez donc tomber en la contemplant la première pluie qui concentre toute la merde atmosphérique, puis, c'est l'occasion, car il pleut beaucoup : allez-vous laver enfin de toute la possession qui est sur vous, engrammée dans vos champs énergétiques, aller vous laver sous cette pluie qui est un sourire du ciel.
De nombreuses traditions anciennes attribuaient à la pluie la valeur d'un exorcisme. L'eau bénite, venue du ciel. Dans certains endroits, danser nu sous la pluie, en priant pour être lavé était un sacrement. La "pudeur" qui a fait des parties génitales des "pudenda", les parties "honteuses" nous a coupés de ce bienfait. Mais avec le minimum de vêtements on peut avoir le même bénéfice.
Oubliez les parapluies, qui sont ce que les préservatifs sont à l'amour, en plus du fait qu'ils peuvent crever les yeux des passants.
Marchez lentement sous la pluie, si elle n'est pas trop froide, et laissez vous laver. Elle lave jusqu'au tréfonds, emporte tous les blocages et toutes les peines.
Si ça vous dit, buvez trois grogs bien tassés, en disant à votre mauvaise conscience, s'il en reste : mets ça sur le compte à VJ.
Vivez la pluie comme ce qu'elle est vraiment : un Don du Ciel. Aimez la. Comme vous même.
Vivez la vie pour ce qu'elle est : une histoire d'amour.