Plant de potiron réjoui à l'assaut d'une vieille baraque.
Peut-être vous demandez-vous parfois comment j'écris, comment me viennent ces idées, ces textes, ces phrases.
Je l'ai dit ailleurs : une partie de l'inspiration vient du dialogue que nous avons, Mme VJ et moi, à table, en voiture, la nuit.
D'autres fois, de mes observations ou méditations au fil des nuits et des jours.
Je suis un adepte de la méthode de Georges Perros,qui écrivit deux recueils de "Papiers collés" (L'Imaginaire, Gallimard), dont j'extrais cette phrase cueillie au vol, page 87 : "Ce sont les autres qui m'ont rendu intelligent".
Quand une idée me frappe, et les idées nous frappent comme des gifles, mais souvent nous n'aimons pas les gifles, je la griffonne sur un post-it, un papier collé.
Dans mon bordel personnel, croulant de dossiers et de toute sorte de paperasse, dont la plupart ne vaut pas du fumier, mais permet la survie de mon organisme, il y a aussi des morceaux de papier carrés, jaunes, mauves, souvent illisibles, qui servent de cercueil à une idée qui étouffe sous la poussière.
Car, lorsqu'elle a atteint son but de drone, qui est de me titiller les neurones, épuisée, venue de l'outr'espace-temps, l'idée s'effondre sur le papier où je la couche hâtivement.
Et des dizaines de post-it gribouillés passent à la trappe faute de soins. Certains surnagent je ne sais comment. Le service aux naufragés se met en place lorsque retentit le signal d'alarme : ILN'YAPLUSD'ARTICLESPOURLEBOLGJEREPETEILN'YAPLUSD'ARTICLESSPOURLEBLOG
qui déclenche une panique où l'on met les canots à la mer on ouvre en vitesse l'une après l'autre les bouteilles de chardonnay , et où l'on recueille tout ce qu'on peut, et la discrimination bat son plein : t'es qui, toi ? Mais bordel, y'a quoi d'écrit ? Illisible, poubelle. Non, laisse-la, ça reviendra. Ça, non, pas mûr, je le sens pas. Comme au marché, faut que ça soit mûr. Pas trop, mais assez.
Si c'est mûr, lisible, et que ça plait, hop, on embarque. Ça, c'est la phase sauvetage.
Après, c'est la préparation du bébé. Faut le rendre présentable. Alors, croyez le ou non, il n'y a pas la moindre intention, par la moindre structure. Si le sujet est formé, il sort d'un coup. Les phrases s'alignent toutes seules, imperturbablement.
Maïeutique, disait Socrate, fils d'une sage-femme.
Voilà : pour résumer, je suis une espèce de sage-femme. Je passe entre les lits de mesdames les idées sur le point d'accoucher, et d'un air doctoral en palpant les fesses de mon adjointe, je dis : toi, t'es prête, tu sors. Toi, t'attendras.
Lorsqu'elles sortent, je les apprête, je les nettoie, je les attife, mais, comme ce ne sont pas des putes, mais des idées venues me et vous travailler, je ne les maquille pas, ou si peu...
Une photo, une musique, un petit mot d'encouragement, et elles s'en vont toquer à vos portes.
Recevez-les, laissez-les dehors, maintenant elles sont nées et feront leur tour du monde.
Recevez-les, et m'en donnez des nouvelles, ce sont des enfants de l'amour. Ce sont de belles filles, et fières. Elles sont venues pour féconder de beaux enfants à ce vieux monde moribond.
Nous en serons les grands-mères et les grands-pères.
Nous sommes les ancêtres mythiques du monde de demain. Ça me donne envie d'aller danser. Pas vous ?
Allez, pour vous donner envie de lire Perros, sa photo :
Ça vaut toutes les machines du monde, une tête d'honnête homme, non ?
Écrit ce 20 novembre en écoutant les chansons du beau Serge, l'Italien, Reggiani.