La chanson est un art mineur, chantait Nougaro.
Parce qu’il y a des arts majeurs. L’homme qui passe trois ans à écrire un opéra devant lequel tout le monde s’endort en est sûr.
Le temps fait-il à l’affaire ?
Nous sommes à la saison où fleurissent les blogs. Le blog est-il un art mineur ? Par pure légèreté, je serais tenté de répondre : oui, s’il remonte un peu de minerai à la surface.
Mon blog sera majeur s’il survit plus de 18 ans. Alors, chargé de la légion d’honneur, de toiles d’araignées et de poussière virtuelle, peut-être fera-t-il son entrée chenue à la Cacadémie bloggesque.
Qu’importe ?
L’important, ce qui vraiment est important, c’est : Est-ce utile ? A celui qui le pond, et le découvre avant vous ? A vous ? Sûrement, puisque vous l’aimez et le dites.
Il y a longtemps que je me suis aperçu que l’un des actes les plus importants de mon existence, c’est de laisser passer les personnes qui attendent de traverser les passages cloutés. Parfois, je les engueule intérieurement, tant elles sont timorées et n’osent rien, verrouillées par la peur.
Mais souvent, je jubile à voir leur sourire, leur joie à découvrir que non, cette longue file métallique n’est pas faite d’un bloc soudé de fantômes, il reste des humains là-dedans, des résistants, des gens de tripes et de sang, qui m’ont aperçu, moi le pépé, la mémé. Je ne suis pas seul sur l’île déserte. Tout espoir n’est pas vain, la vie peut renaître.
Dans notre société de singes, le singe en chef, qui a la plus chevronnée des guenons, les plus sombres combines, les plus luxueux porteclefs, lui dont tous les autres reniflent le cul avec rage et bassesse, auquel mille robots haineux, galonnés et chamarrés ouvrent la marche, reste un singe.
Les petits vieux qui me remercient d’un sourire ou d’un geste parce qu’ils traversent en paix une rue agitée sont restés ou devenus des humains vivants. Petits, vieux et oubliés, eux savent ce qui importe vraiment.
Je les serre sur mon cœur.