J'ai exposé la synchronicité précédente, celle dont le sujet est l'or, car elle est rare et exemplaire. A part le soleil qui m'a aveuglé à l'instant même où je lisais l'expression in saecula saeculorum, je peux tout prouver : l'article de Bouddhanar, mon achat du livre et évidemment faire une copie de sa page 133; quant au commentaire de Chantalouette, et le lien auquel il mène, on peut le vérifier sur ce blog. Pour le soleil, là, il faut me croire sur parole.
Il n'empêche que même sans cet éclat solaire, on a quand même une convergence, moins éclatante, c'est le mot, mais convergence quand même.
Pourquoi remuer tout cela ? Parce que les implications sont prodigieuses. Chaque personne a connu des signes, des synchronicités, dès que les oeillères des dogmes sociétaux ou matérialistes de base se sont écartées. Dès qu'on en a saisi une, il s'en présente une seconde, au point qu'il existe une sorte de désordre mental qui consiste à se focaliser sur ce genre d'occurences, et d'en déduire une espèce de sentiment d'être un personnage à la destinée exceptionnelle et unique, remarquable, distingué de la masse. C'est un risque d'inflation de l'ego à ne pas négliger.
Ceci dit, que penser du phénomène des synchronicités ?
Faisons le rappel de ce qui s'est manifesté, afin de prendre conscience de l'énorme et invisible machination qu'un tel scénario requiert :
- il a fallu que Félix Crespo (Bouddhanar) écrive un sujet issu de ce bouquin de Jean Prieur;
- il a fallu que j'achète ce livre, et que je le lise;
- il a fallu que me vienne dans le même temps l'idée d'écrire un texte sans rapport avec cela, y incluant un lien vers le village des Pions;
- il a fallu que Chantalouette réagisse à ce lien, et y fasse un commentaire menant lui aussi à un lien;
- il a fallu que ce lien comporte un court texte de Jean Anglade (lequel a publié 80 livres), lequel texte citait une expression latine oubliée et volontairement erronée;
- il a fallu que le même jour, une heure plus tard peut-être, dans le livre cité par Bouddhanar, je découvre cette expression correctement écrite cette fois-ci.
La coïncidence est déjà énorme, et la probabilité qu'elle se produise, infinitésimale.
Mais que tout ceci se déroule de sorte que ma seconde lecture, qui me fait prendre conscience que je viens de retrouver l'or volé, ait lieu à l'instant précis où le soleil me décoche l'un des rares rayons de cette journée dépasse l'imagination (la mienne).
Pourquoi tant d'efforts pour un si petit effet ?
Parce que ça ne coûte rien à l'Intelligence qui meut les univers. Aucune dépense d'énergie. L'Univers est une danse cosmique, dans laquelle chaque mouvement, même le plus obscur, est parfaitement imbriqué dans la mouvance globale, laquelle n'est qu'un reflet, la manifestation d'un rêve, le rêve le plus complexe, le plus abouti qui se puisse.
"Le langage du monde s’écrit par chances et coïncidences.
Dans la vie, tout est signe." (Paulo Coelho)
"Les évènements ne se réalisent pas, ils se révèlent" (Sri Aurobindo)*
Peut-être ce que certains appellent Dieu.
Reste une question : qui agit ?
Bouddhanar, lorsqu'il a décidé de citer ce livre, Chantalouette quand elle a envoyé ce lien, et moi, quand j'ai publié mon texte, savions-nous qu'il en découlerait cette convergence ? Avons nous choisi ?
Qui a déterminé ce déroulement implacable ? Qui agit par nous ? Nous qui croyons décider de tout, de la couleur de la chemise ou de la robe du jour, de notre emploi du temps, pouvons nous être certains que nous sommes bien aux commandes ?
Bien sûr, Boudhanar, Chantalouette et moi avions une intention, une justification, avons manifesté une volonté déterminée, un choix peut-être entre diverses options, qui, s'il avait été autre, aurait donné un résultat différent (peut-être une autre synchronicité), mais le fait que cette cascade de choix aboutisse à une telle convergence tend à prouver que nous sommes loin d'être aussi indépendants que nous aimons à le penser.
Même la micro-seconde à laquelle j'ai regagné le canapé, la vitesse à laquelle j'ai lu, le quart de seconde pendant lequel j'ai pu observer une mouche ou un oiseau qui passait où me gratter le bout du nez, tout cela a concouru à ce qu'à l'instant fatal, un rayon de soleil perce les nuages et m'éblouisse de son précieux or.
Impossible à combiner, sauf par le Grand Esprit. L'Auteur dont nous sommes les personnages.
Je sais, c'est cruel. La plupart des gens préfèrent s'accrocher à cette idée que moi moi moi, personne ne me dira ce que j'ai à faire, moi, monsieur, chuis assez grand. D'ailleurs, moi, j'ai des signes qui me montrent que je ne suis pas n'importe qui. Pis moi, je suis un créateur. J'ai des super idées. Moi moi rien ne m'échappe, rien ne m'effraie. C'est pas le travail qui me fait peur. Moi moi et moi.
Je est vraiment un Autre**, pas de doute.
* Deux citations piquées sur un mail privé de Mme Yog.
** C’est faux de dire : je pense : on devrait dire : On me pense. - Pardon du jeu de mots.
Je est un autre. Tant pis pour le bois qui se trouve violon, et nargue aux inconscients, qui ergotent sur ce qu’ils ignorent tout à fait ! (Arthur Rimbaud, Lettre du Voyant)